Dans un communiqué du Ministère de la
Santé publique il a été signalé que les services du Ministère de la
Santé ont détecté l’existence sur le marché d’un complément alimentaire
imité et prévient le public usager des conséquences de la consommation
de ce produit appelé RECALCIFIT du laboratoire français Chênes Pharma.
Le même communiqué appelle les citoyens à
consulter le médecin traitant et appellent également les médecins à ne
plus le prescrire et les pharmaciens à ne plus le vendre, et ce, à titre
préventif jusqu’à l’obtention des résultats de l’enquête conduite
actuellement.
D’après ce communiqué la Direction de la
Pharmacie a relevé la commercialisation d’un produit douteux et
d’ajouter qu’il est existe « l’absence du conditionnement préalable ».
Ce communiqué interpelle à plus d’un
titre. L’article 8 de la loi n°85-91 du 22 Novembre 1985, réglementant
la fabrication et l’enregistrement des médicaments destinés à la
médecine humaine, stipule que « L’autorisation de mise sur le marché
d’un médicament est délivrée pour une période de 5 ans, elle est
renouvelable par périodes quinquennales. » Il n’est nullement question
d’AMM pour les produits PARA.
Du produit :
S’agit-il d’un médicament ou d’un produit parapharmaceutique ?
S’il s’agit d’un médicament, alors il y a
eu délivrance d’une AMM, auquel cas le suivi et le contrôle du
Ministère devraient être permanents et qu’il n’est pas permis au
Ministère d’attendre que les citoyens l’informent de l’existence d’un
produit malsain.
S’il s’agit d’un produit para, alors le
contrôle n’est plus du ressort exclusif du Ministère de la Santé mais
appartient à tous les corps de contrôle, y compris ceux du Ministère du
Commerce, notamment. puisqu’il s’agit d’un complément alimentaire tout
comme les produits de ce genre, qui circulent et qui sont consommés par
les sportifs par exemple et qui se trouvent dans les salles de sport
sans le moindre contrôle et qui peuvent être aussi dangereux.
Cependant « l’absence de conditionnement
préalable » a été évoquée et cela nous pousse à nous demander, s’il
s’agit de produit para. Dans ce cas, il y a bien une défaillance
règlementaire dans la mesure où le contrôle n’est pas effectué de la
part de la DPM, sinon il aurait fallu le généraliser à tous les produits
d’hygiène et de soins du corps qui se vendent dans les pharmacies.
D’ailleurs le moment est venu peut-être, pour s’occuper du contrôle à
priori et concomitant des produits PARA qui se vendent dans les
pharmacies qui constituent un lieu de confiance pour les consommateurs.
A ce propos le secteur de la
parapharmacie, appelle du Ministère une attention plus accrue, car on
trouve des produits commercialisés par les pharmacies censés l’être
exclusivement, et qui sont également commercialisés par les commerces de
la parapharmacie. Une règlementation du secteur s’impose ou devrait
s’améliorer.
De l’imitation ou de la contrefaçon :
L’imitation et la contrefaçon sont
régies par une autre législation et règlementation à savoir celle
relatives aux marques, aux brevets et aux dessins et modèles
industriels. Je cite la Loi n° 2001-36 du 17 avril 2001, relative à la
protection des marques de fabrique, de commerce et de services, la loi
n° 2000-84 du 24 août 2000, relative aux brevets d’invention et la loi
n° 2001-21 du 6 février 2001, relative à la protection des dessins et
modèles industriels
En effet quand on parle d’imitation il
faut revenir aux dispositions de ces lois et décrets qui précisent que
seule la Justice est en droit de se prononcer sur l’imitation et la
contrefaçon et ce, sur la base notamment de protection des éléments
incriminés.
Ainsi, si on évoque l’imitation, il faut
que celle-ci soit établie sur l’élément fondamental, en l’occurrence
l’enregistrement de la marque, du brevet d’invention ou du modèle.
La circulation dans le commerce d’un
produit sans enregistrement, certes permise, ne donne pas droit à son
exploitant de prétendre à son exploitation exclusive. En d’autres
termes, celui qui ne prend pas la peine d’enregistrer sa marque, son
modèle ou son invention en Tunisie, ne dispose d’aucun droit de
propriété même s’il s’agit d’exploitants étrangers dont l’exploitation
se fait directement par lui ou par son représentant local.
Dans ce cadre, on est en droit de se
poser la question de savoir comment le Ministère de la Santé, évoque
dans son communiqué l’imitation ou la contrefaçon face à un produit qui
n’est pas un médicament « s’il n’y a pas eu délivrance d’une AMM » ou un
produit para dont le regard ne le lui appartient pas exclusivement et
notamment en matière de protection de la marque, du modèle ou de
l’invention.
Par conséquent, le Ministère de la Santé
n’est en droit d’agir que sous le vocable « Sauvegarde de la Santé de
la population » et non sur l’imitation ou le doute de l’imitation.
Le Communiqué du Ministère devait se
limiter à annoncer le retrait d’un produit du marché sans se prononcer
sur une raison autre que celle relative à la Santé.
Parce que nous sommes dans un pays qui
reconnait le droit de chacun, la question qui se pose est celle qui
consiste à dire que fera le Ministère de la Santé quand le détenteur du
produit incriminé prouvera que l’imitation n’existe pas et que le
Ministère de la Santé était dans le tort sur la question de l’imitation.
Ceci peut amener le Ministère à réparer le préjudice causé par son
communiqué.
La Direction de la Pharmacie est appelée à fournir des explications quant à l’usage du terme IMITATION
Imitation par rapport à quoi ? A l’usage de la marque, est-elle d’abord protégée en Tunisie ?
Imitation de l’invention, invention de
qui, et est-ce qu’il y a eu délivrance d’un brevet en Tunisie et est-il
encore en vigueur ? Le constat de l’absence du conditionnement préalable
donne-t-il le droit au Ministère de la Santé pour se prononcer sur
l’existence ou l’inexistence d’une imitation ?
MAATOUG Nour-Essaid
Conseil en Propriété Industrielle
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